01 mai 2006

Contes sur Clearstream


Une bien morose fête du travail pour le Premier ministre. La campagne de presse qui se déchaîne contre lui dans cette affaire corbeautée lui laisse une terne alternative : admettre et se démettre en forme de Waterloo personnel, ou nier et s’accrocher dans la minable tradition des bigorneaux politiques.
Curieusement, le gros des éditorialistes limite sa verve à l’échevelé dépité sans redoubler la charge contre son chef qui, selon les déclarations du général Rondot, serait la source originelle du déclenchement de l’enquête dans l’ombre réclamée contre le gêneur Sarkozy.
Voilà du lourd : la sphère opaque du Renseignement, jusqu’alors évanescence muette pour le commun des mortels, se risque à l’opération Portes ouvertes… aux scandales.
Des éléments nous échappent certainement, mais la pointe de l’iceberg suffit à entretenir la nausée qui s’installe chez tout observateur affûté des miasmes gouvernementaux et présidentiels. Des ficelles bien grosses dans cette tentative d’éliminer, dès 2004, celui qui se posait en rival bien rasé du vieillissant Chirac. Une seule question capitale subsiste : qui est le corbeau, et peut-être surtout qui lui a suggéré l’envoi de cette liste grossièrement falsifiée ?
La version fade serait un coup des chiraquiens. Beaucoup plus machiavélique, rappelant les arcanes du faux attentat de l’Observatoire contre Mitterrand, serait l’approche du «faites-en sorte qu’il ait l’impression que l’idée vienne de lui» (principe du manipulateur manipulé dans L’Aile ou la cuisse de Claude Zidi). Imaginons que le corbeau soit effectivement un sbire chiraquien approché par un occulte sarkozyste non déclaré qui, par talent rhétorique, l’amène à avoir l’idée d'une liste trafiquée (en l’élargissant à d’autres personnalités pour qu’elle paraisse plus crédible, moins focalisée). L’objectif des créateurs du corbeau est de lui faire lancer un appât auquel les Villepin-Chirac, en quête d’une voie pour neutraliser le Sarkozy, pourraient mordre, préparant ainsi, sans s’en douter, leur fatal discrédit. Ajoutons à cette hypothèse quelques autres contacts clandestins pour que la supercherie se révèle au moment opportun : voilà qui relèverait de la magnifique salauderie.
A moins qu’un royaliste underground (pas de la couronne mais de la Ségolène) soit la clé de cette fumeuse affaire selon, grosso modo, la même stratégie de fond (ce qui expliquerait la présence de DSK sur la liste explosive).
A moins qu’une inavouable alliance d’adversaires ait eu pour impératif d’évacuer un ennemi commun…
Tout cela ? Sans doute des contes pour contempteur du ruisseau bourbeux dans lequel pataugent quelques gouvernants…

Aucun commentaire: