03 octobre 2016

L'avis extrapolitique attendu

Après la publication d’un sondage où plus de soixante pour cent des citoyens interrogés réclament une retraite politique anticipée pour les deux derniers occupants de l’Elysée, je me prends à fantasmer un moment de grâce politique comme les professionnels du pouvoir ne nous en offrent que deux ou trois par siècle…


« Attendu que la situation critique du pays requiert un sursaut de lucide dignité ;
attendu que notre occupation successive des fonctions présidentielles n’a pu permettre de redresser ou de changer favorablement la France ;
attendu que le constat s’impose d’une incapacité à honorer les plus importantes de nos promesses électorales ;
attendu que notre mandat respectif s’est tiraillé entre stratégie politicienne en vue de l’échéance électorale suivante et gestion improvisée dans des contradictions néfastes pour le pays ;
attendu que de bling-bling en couac, de couac en tweet-tweet, nous n’avons pas su préserver la sacralité de la fonction ;
attendu que la place hypertrophiée accordée à la communication au détriment de l’engagement véritable n’a fait que décrédibiliser davantage l’exercice du pouvoir rendu gesticulatoire ;
attendu que la vitalité démocratique commande de ne pas s’acharner dans une dynamique purement opportuniste ;
attendu que nous devons tendre à l’exemplarité en reconnaissant nos erreurs et en affrontant de pesantes accusations ;
attendu que nos candidatures font courir le grave risque, par l’absentéisme accru d’électeurs écœurés, de la consolidation des extrêmes ;
attendu que sans notre présence les débats de la prochaine campagne s’en trouveront renouvelés et que le sens frais aura ainsi une chance d’émerger ;
attendu qu’un nouveau souffle de l’Union européenne ne peut se concevoir avec une France présidée par un déjà-vu ;
attendu que l’hypothèse d’un monde agité par le stratège Poutine et Trump l'imprévisible impose la régénération d’une forte voix française ;
attendu que notre vénération affichée, feinte ou réelle, pour l’intégrité gaullienne de l’occupation de la présidence de la République française exige qu’une fois, dans notre déjà long parcours politique, nous nous hissions à la hauteur de notre référence ;
attendu qu’est venu le temps d’une éthique de l’exercice du pouvoir tout entier dédié à l’intérêt général et non à la satisfaction de visées personnelles inavouables ;

Par ces motifs, nous, François Hollande et Nicolas Sarkozy, sains de corps et d’esprit, avons l’honneur de ne pas solliciter vos suffrages afin de ne pas obérer les chances pour notre pays chéri et pour l’Union espérée de viser au mieux un cap salvateur. »



Auraient-ils assez d’épaisseur humaine, de sens du sacrifice d’une carrière déjà suffisamment comblée, de perception assez aiguë de l’exaspération furieuse du pays pour oser ensemble ce choix, laissant ainsi, pour un court instant, la sphère médiatique sans voix et, pour un moment à prolonger, la France avec une perspective plus enthousiasmante ? Evidemment non… Si la vie extraterrestre apparaît de plus en plus probable, l’avis extrapolitique ci-dessus ne peut prétendre qu’au néant.

Aucun commentaire: