18 avril 2010

Prose vagabonde

Lyon m’a accueilli voilà plus de dix ans et sa dimension comble mes choix de vie. Cette ville favorise mon souffle indigné pour croquer les malfaisants, qu’ils sévissent dans les cités concentrationnaires ou sur les marchés financiers. Alors voilà : j’affiche mon ancrage dans ce tissu urbain aux proportions aérées pour mieux fustiger à tout va dès qu’un effluve incommode, sitôt qu’une pestilence s’impose.

Quoi donc dans l’actualité de ces dernières semaines ? Moscou se fait éclater ses profondeurs métropolitaines par deux donzelles à la tenue explosive. Obama et Sarkozy se léchouillent pour la galerie médiatique. La Justice française refait son coup tordu du responsable-mais-pas-coupable inspiré par l’absoute Georgina Dufoix : Total s’en brosse les pognes. Les FARC, Fieffés Abrutis au Ramdam Criminel, libèrent, mais au goutte-à-goutte. Bayrou persiste et signe son arrêt de mort politique : ses rares proches encore convaincus (comme la Cunégonde qui veut du fromage…) bichonnent leur trou d’autruche. La baballe footballistique emmerde toujours autant et donne matière fécale aux échanges nourris sur le zinc. Le Vatican cumule les déviances : il se voile la face et cadenasse sa Maison close, espérant que l’on compatisse au calvaire de ses membres pédomanes (selon le plus juste vocable proposé par l’inspiré Odon Vallet).

Laissons cette écœurante tablée de mets blets. Irrésistible envie d’écouter Albert Dupontel : propos à rebours des ambiances lénifiantes et crétinisantes du moment (quoique cette période vaille les autres, ni plus ni moins). Rare dans les médias, il confie ne pas supporter les instants de promotion d’œuvres réalisées. Une intelligence vive d’écorché indomptable, ne s’économisant pas dans l’autocritique, désespéré par l’inéluctable mort comme horizon d’existence. Entre angoisse et dérision, une humanité qui nettoie des postures moulées pour se fondre dans des communautés formatées.

Ma liberté, c’est de ne pas vivre de mon art. Rester sans pression autre que l’irrépressible besoin d’exprimer, de ferrailler contre les pseudos révolutionnaires qui se cachent sous de protecteurs pseudonymes, de dire au risque de se contredire et de ne pas tenir dans les cases idéologiques attendues. Ni droite, ni gauche, ni écolo, ni pollueur crado : modeste observateur qui laisse croître sa conscience d’un système en sursis. Un modèle qui se cherche, de sales réflexes qui résistent, d’obscènes dérives qui recommencent…

Bruno Sachs trimballait son insoignable maladie. Goldman fait mieux : Sachs la maladive empuantit l’alentour ! Une frénésie feutrée pour cumuler les culbutes financières, surtout lorsque les pratiques, pour y parvenir, se torchent avec les principes de base d’une vie respectueuse de la collectivité. Ce symbole de l’hypertrophie financière, que les États ne peuvent laisser s’effondrer sous peine d’un chaos sans retour, cultive l’impunité des voyouteries de luxe. Jouer sur tous les tableaux, contrôler ses adversaires et ses apparents compères pour mieux les pressurer le moment venu, siphonner toutes les sources de profits pour maximaliser sa puissance… N’y a-t-il pas là une nouvelle forme de crime contre l’humanité ? Point de sang versé, nulle intention d’éliminer telle section de la population, mais un ensemble de stratégies captatrices qui font risquer au système économique mondial d’imploser avant de laisser émerger de nouvelles barbaries.

En septembre 2009, Guillaume Durand faisait témoigner l’ancien trader Kerviel : ses arguments et son apparente sincérité tracent la salauderie d’une hiérarchie qui l’a sacrifié dès que l’emballement de ses positions a pris le mauvais sens. Vertigineux et insensé Casino avec l’argent des déposants. Le terme qualifiant l’activité des banques sur les marchés n’est pas d’un loufoque pamphlétaire comme moi, mais de Peyrelevade, ancien président du Crédit lyonnais. Tout ce que je dénonçais dans le Coup de pouce… dans l’cul suivi du Doigt bancaire profondément placé est confirmé par un des principaux acteurs qui a poussé au bout l’attente vorace de ses supérieurs avant de se faire lyncher dès que les vents du flouze facile se sont déréglés. Pour les cinq milliards de pertes mis sur sa tête, résultant de cinquante milliards de position, il laisse entendre que la Société générale aurait gonflé sa descente pour mieux dissimuler de plus interlopes pertes.

Tiens ! Une curiosité : notre belle banque française au Poupouce averti aurait fricoté avec la maladive Sachs qui infecte tout ce qu’elle convoite.

Les années s’écoulent, le témoignage se cabre, les relations s’étiolent, me confortant dans une indifférence attentive. Rien pour soulever une adhésion sans borne. Fini la naïveté du converti.

4 commentaires:

nicocerise a dit…

Un commentaire pour dire que j'ai apprécié cette lecture pour se quelle donne à penser, vagabondage au même rythme que ce billet. Je suis venu vous voir à propos de la littérature de latrines de Michel Onfray qui m'a fait penser à la tradition pamphlétaire et donc à vous.

Loïc Decrauze a dit…

Merci pour cette attention que, finalement, je ne sais dans quel sens prendre... Sans doute l'effet Turc des latrines !

Anonyme a dit…

Je ne suis qu'une petite Paola, mais j'ai réellement apprécié cette lecture qui réconforte certaines de de mes petites convictions : tout particulièrement l'affaire Kerviel !

Loïc Decrauze a dit…

Merci chère Paola. Je suis heureux d'avoir pu conforter vos convictions.